Chaque année, le Centre Wallonie Bruxelles à Paris projette le meilleur du court métrage belge francophone. C’est le festival « Le Court en dit long », dont avait lieu début juin la 33e édition. Retour sur quelques films marquants et autant de jeunes cinéastes à suivre.
Plat de résistance de Marie Royer et Zinia Scorier.
C’est l’histoire d’un groupe d’activistes en lutte contre un projet immobilier, qui occupent le terrain constructible pour le transformer en jardin partagé et concentrent leurs réflexions idéologiques autour d’un sujet essentiel : l’alimentation. Pour raconter cette aventure politique, les réalisatrices optent pour une forme aussi passionnante qu’originale, le film d’animation documentaire. Elles partent d’enregistrements audio d’actions et de discussions du groupe, et les mettent en scène dans une animation très douce et subtile qui rappelle les dessins à l’aquarelle. Une belle histoire, loin d’être anecdotique, racontée avec poésie et non sans humour. Zinia Scorier et Marie Royer sont diplômées depuis 2019 de la Haute École Albert Jacquard de Namur. Plat de résistance est leur premier film après l’école.

Martin a peur du noir de Victor Ruprich-Robert.
Jeune réalisateur bruxellois, Victor Ruprich-Robert a présenté deux films cette année au festival Le Court en dit long, faisant preuve l’un comme l’autre d’une mise en scène aussi maîtrisée qu’audacieuse. Le premier, Glute, nous emmène dans les coulisses d’un restaurant façon The Bear, autour d’une blague de mauvais goût qui tourne mal. Le second, Martin a peur du noir, est certainement l’un des courts métrages les plus fous que l’on ait pu voir cette année. Une histoire d’amour toxique, racontée dans le désordre, empruntant les codes du body horror, avec une mise en scène vertigineuse qui embarque comme une montagne russe. Il faut ajouter que Victor Ruprich-Robert sait très bien filmer ses comédiens (les excellents Maxi Delmelle et Malou Mullier). Le réalisateur n’est pas venu au Centre Wallonie Bruxelles pour rien, puisqu’il est reparti avec le Prix du Scénario pour Martin a peur du noir et le Prix Coup de Cœur de la RTBF pour Glute. Il prépare aujourd’hui son premier long métrage qui sera, sans nul doute, un petit événement.

Jason et les Royaumes de Bertille Zénobie.
Parfois, certains grands films se remarquent dès leur titre. Avec le poétique Jason et les Royaumes, Bertille Zénobie intrigue. Pas d’argonautes ni de héros grec dans ce court métrage à l’approche naturalise. Jason (qui se prononce à l’américaine) est un jeune homme qui passe l’été chez sa grand-mère, dans le sud de la France. Quelques semaines plus tôt, il a failli mourir en moto. Depuis, il suit une rééducation quotidienne. Dans le taxi qui l’emmène de la maison de sa grand-mère au centre de rééducation, il s’invente une vie, raconte à sa conductrice des histoires qu’il aurait vécues bien loin, dans des pays étrangers. Chronique d’un été d’ennui, Jason et les Royaumes saisit avec beaucoup de justesse des émotions complexes. Bertille Zénobie y parvient grâce à une mise en scène aussi subtile que précise, une écriture au cordeau, et un sens aigu et parfois audacieux du montage. Jason et les Royaumes est son troisième court métrage.

Et aussi :
Sanguine de Capucine Pinaud : l’étrange récit d’une jeune femme jalouse de son amie enceinte, s’inscrivant dans l’héritage d’un nouveau cinéma de genre féminin (entre Julia Ducournau et Coralie Fargeat), brillamment interprété par deux actrices particulièrement talentueuses.
Une nuit d’avance de Julien Bernard-Simmonds : Grand Prix du festival, ce récit de fantômes et de routiers navigue avec brio entre plusieurs genres, et a pour cadre un milieu rarement décrit de manière aussi crédible au cinéma, celui des aires d’autoroute et des conducteurs longue distance.








