L’artiste madrilène s’empare de Guernica de Picasso, symbole universel contre la guerre, pour créer une œuvre unique qui repense le conflit dans une expérience multisensorielle et une perspective contemporaine.

Le travail de Carlos Blanco Artero est fascinant dans sa réflexion et son processus créatif. C’est une danse perpétuelle entre les couleurs, les compositions, les textures, les lignes, les volumes et la profondeur. L’art, sous toutes ses formes et ses représentations, a eu un impact considérable sur son approche au fil du temps. Celui de Pablo Picasso en tête de cortège. C’est à l’âge de six ans que l’artiste natif de Madrid découvre dans un musée l’une de ses œuvres les plus célèbres, Guernica (1937), et à neuf ans qu’il organise sa première exposition d’art chez General Motors à Saragosse. Depuis lors, le parcours de Carlos Blanco Artero est jalonné d’inspirations majeures et de voyages à travers le monde (Paris, New York, Berlin, Autriche, Australie, les Canaries), qui nourrissent son style marqué par l’abstraction, la nouvelle figuration et le déstructuralisme figuratif.
Influence des maîtres
Dans ses séries comme Fiesta, Iptics, Crowds, Meninas et Arabesque, il puise chez des artistes de différents courants et domaines : Gustave Courbet (Le Désespéré), George Condo (Rush Hour), Diego Velázquez (Les Ménines), Francis Picabia (I See Again in Memory My Dear Udnie) ou encore Claude Debussy.
De ces figures tutélaires et inspirantes, le spectre du maestro cubiste reste cependant central dans la plupart de ses œuvres. Carlos Blanco Artero propose avec sa réinterprétation de Guernica un dialogue entre passé et présent, qui sonde les thèmes de la mémoire, du conflit et de la perception collective.
Dès le départ, il envisage de la reproduire approximativement dans une même taille et une même période de temps. « Je souhaitais ressentir la sensation de faire face à une toile de dimensions similaires », explique-t-il. Pensée dans onze tons différents, du blanc au noir, avec des effets de mise au point et de flou, son œuvre monumentale se veut « proche sans être évidente », offrant un nouveau regard sur le cubisme.
Repenser Guernica
Sa vision audacieuse se fait d’ailleurs multidisciplinaire, s’invitant sur la plateforme numérique Repensar Guernica du musée Reina Sofia de Madrid, qui invite le public à une exploration interactive de l’œuvre de Picasso. La toile de Carlos Blanco Artero dépasse son cadre pictural pour une expérience multisensorielle, empruntant au son et aux éléments de synesthésie artistique. « Je voulais que l’expérience ne soit pas seulement visuelle, mais que le spectateur puisse ressentir et entendre le chaos et la fragilité que représente Guernica », précise-t-il.
En 2025, l’œuvre prend ses quartiers dans les installations permanentes de Saisho, galerie et marché de l’art de la capitale espagnole. « Ce qui m’a toujours intéressé dans Guernica, c’est sa plasticité, son excellente composition géométrique, sa conception presque comme un triptyque, les mains et les pieds, les gestes de douleur, c’est un cri déchirant qui est accentué par tous les plans et bords géométriques nets ; noir et blanc, qui, comme le dit Picasso, le fait “ressembler à une grande gravure” et lui donne une immortalité dramatique. »
Cette réinterprétation ne cesse ainsi de réaffirmer l’engagement de Carlos Blanco Artero à transformer l’art en un outil de dialogue et de changement social.