La galerie Thaddaeus Ropac à Séoul a présenté la période la plus proéminente dans la carrière de James Rosenquist, devenu dans les années 1960 l’un des artistes américains les plus influents de sa génération. Retour.

© James Rosenquist Foundation / Licensed by Artists Rights Society (ARS), NY. Used by permission. All rights reserved.
« J’ai peint les choses qui avaient besoin d’être peintes. » Avec « Dream World: Paintings, drawings and collages, 1961-1968 », la galerie Thaddaeus Ropac à Séoul nous a plongés dans les années décisives de James Rosenquist (1933-2017), figure de proue de l’art moderne et du pop art, au même titre que Roy Lichtenstein, Claes Oldenburg et Andy Warhol. L’accrochage rassemblait ainsi les oeuvres fondatrices de ce natif du Dakota du Nord, présentant ses peintures aux allures de panneaux publicitaires, ses gravures sous forme de collages et ses croquis préparatoires, qui ont façonné son « vocabulaire visuel idiosyncrasique ».
MONUMENTALES ET CONTRE-CULTURELLES
L’espace a notamment mis à l’honneur l’oeuvre pour laquelle il obtint la reconnaissance internationale et qui a rejoint la collection permanente du MoMA : F-111 (1964-1965). Cette toile de 26 mètres et demi de long, conçue pour sa première exposition personnelle à la galerie Leo Castelli de New York, possède 59 panneaux imbriqués, déterminés par les quatre murs de cet espace. Elle représente un chasseur-bombardier F-111, alors en cours de développement par l’armée américaine. L’engin aérien est enveloppé d’images photographiques et publicitaires mêlant motifs floraux, papier peint, pneu Firestone, fourchette plantée dans les spaghettis et parasol de plage superposé à une explosion atomique. Cette création monumentale, considérée par beaucoup comme une oeuvre pacifiste, faisait écho au complexe industriel militaire sur lequel se basait la société de consommation nord-américaine.

Il en va de même pour Playmate (1966), qui fut exposée ici pour la première fois depuis quinze ans. Cette toile grand format évoque tout autant le zeitgeist de l’époque, brisant les clichés de la représentation des femmes dans la culture consumériste. Celui qui est devenu père de famille en 1964 s’inspire du modèle de la femme enceinte, s’amusant à inverser la dynamique du désir du spectateur masculin. L’artiste construit et déconstruit ainsi la composition pour raconter une autre histoire bien plus complexe sur « les diverses manifestations du désir féminin ».
L’exposition a également remis en lumière l’engagement politique et social de James Rosenquist qui était un fervent défenseur des droits civiques et des idées progressistes des années 1960. Cette dimension importante imprègne son travail tout au long de sa carrière. À l’exemple de Daley Portrait (1968), représentant le maire de Chicago Richard J. Daley, connu pour sa gestion violente des émeutes de Chicago de 1968 après l’assassinat de Martin Luther King. Ou encore de Bedspring (1962), considérée comme son oeuvre picturale la plus radicale au moment de sa création. Ces deux oeuvres sont peintes sur des bandes de Mylar, une matière innovante issue du polyester.

© Courtesy Thaddaeus Ropac gallery, London • Paris • Salzburg • Seoul
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Used by permission. All rights reserved.
FRAGMENTER ET RECOMPOSER
Au cours de cette décennie, ce maître du pop art a intégré des éléments surréalistes, joué avec l’expressionnisme abstrait, sondé les thèmes de la nature et de la technologie, et manipulé diverses techniques. Il s’est également très vite interrogé sur l’essence même du plan pictural en incorporant des objets réels, comme pour Paramus (1966). Dans ce collage d’images existantes, Rosenquist peint, superpose et transforme son imagerie en des juxtapositions étranges. Il offre un même regard avec Source for the Promenade of Merce Cunningham (1963), présentant un découpage d’images et de publicités, arrachées de magazines.
Dans l’oeuvre Source and Preparatory Sketch for The Light That Won’t Fail I (1961), il s’agit d’esquisses préparatoires pour son tableau du même nom, aujourd’hui conservé dans la collection du Hirshhorn Museum and Sculpture Garden à Washington. Quant aux quatre Studies for Horse Blinders (1968), ces oeuvres expriment son sens de la couleur et son intérêt à toujours créer ses propres références.
James Rosenquist, intronisé au Florida Artists Hall of Fame en 2001, a su ainsi réinventer l’imagerie populaire dans son univers pictural, créant son propre espace afin de commenter la politique, la science, l’art et l’histoire pour un large public. « Dans son oeuvre multidimensionnelle, il a continuellement fusionné son monde personnel avec des préoccupations politiques mondiales – la puissance du complexe militaro-industriel, la destruction de notre environnement et les droits de l’homme pour toutes les races et tous les sexes », a affirmé son épouse Mimi Thompson Rosenquist.
« DREAM WORLD: PAINTINGS, DRAWINGS AND COLLAGES, 1961-1968 »
GALERIE THADDAEUS ROPAC / SEOUL FORT HILL
1-2F, 122-1 DOKSEODANG-RO, YONGSAN-GU, SÉOUL (CORÉE DU SUD)
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