Cette icône de la photographie américaine a sondé sur plus de cinquante ans le territoire nord-américain par tous les moyens de locomotion. La Fondation Henri Cartier-Bresson célèbre son travail dans une rétrospective de plus d’une centaine de clichés légendaires.

Second Street, Ashland, Wisconsin, July 9, 1973, de la série Uncommon Places, 1973-1986 © Stephen Shore. Courtesy 303 Gallery, New York and Sprüth Magers

Stephen Shore est aujourd’hui l’un des plus grands dépositaires de l’imagerie américaine du XXe siècle. L’homme âgé de 76 ans a su faire de la banalité du quotidien une beauté significative, et de la couleur, un art à part entière de la photographie, au même titre que Joel Meyerowitz et
William Eggleston. À 9 ans, il commence la photographie. À 14 ans, il vend trois de ses premières images à Edward Steichen, alors directeur du département de la photographie du MoMA. À 16 ans, il côtoie au plus près Andy Warhol et sa Factory qu’il photographie dans une série
publiée dans un livre. À 24 ans, il devient le premier photographe vivant à bénéficier d’une exposition au Metropolitan Museum of Art depuis Alfred Stieglitz, photographe, galeriste et époux de Georgia O’Keeffe. Et le reste est à l’avenant.

Meagher County, Montana, July 26, 2020 46°11.409946N 110°44.018901W, de la série Topographies, 2020-2021 © Stephen Shore. Courtesy 303 Gallery, New York and Sprüth Magers

SUR LA ROUTE

Ce natif de New York a ainsi façonné sur plus de cinquante ans une oeuvre où le voyage, l’itinérance et la mobilité ont une place centrale. Une légende portée par d’autres légendes, comme Walker Evans, son maître, mais aussi Robert Frank, Jack Kerouac, ou encore Bobby Troup, qui ont redessiné chacun à leur manière les contours et les attraits de l’Amérique en mutation, en purs arpenteurs de chemins de traverse. « En road trip, je suis un explorateur voyageant dans une bulle de familiarité : ma voiture. J’ai la liberté de pouvoir voyager dans n’importe quelle direction que je veux aussi longtemps que je le souhaite. Chaque voyage est une aventure. Notre pays est fait pour les longs périples », souligne-t-il dans l’un de ses textes, The Road Trip. C’est ce que démontre la Fondation Cartier-Bresson dans la rétrospective « Véhiculaire & Vernaculaire » et l’ouvrage qui l’accompagne (éd. Atelier EXB), nourris d’une centaine de photographies, prises entre 1969 et 2021.

U.S 89, Arizona, June 1972, de la série American Surfaces 1972-73 © Stephen Shore. Courtesy 303 Gallery, New York and Sprüth Magers

ENTRE RAILS, AVION ET DRONE

L’accrochage fait ainsi la part belle à ses oeuvres les plus emblématiques. À commencer par ses prises de vue instantanées en noir et blanc depuis la vitre de sa voiture lors d’un voyage à Los Angeles. Et bien sûr, ses road trips à travers les États-Unis, qui ont donné lieu à ses séries phares American Surfaces et Uncommon Places. Stephen Shore crée ici un véritable journal de bord photographique, entre « snapshot » et
« scrapbook », où chaque chose faite durant le voyage est répertoriée. L’exposition étend ensuite le champ de sa démarche au passage du XXIe siècle. Le photographe dépasse le cadre de l’habitacle du quatre-roues pour voyager à bord du train et de l’avion, avant d’explorer d’autres vues encore depuis un drone équipé d’une caméra. Intitulée Topographies, cette série inédite, présentée pour la première fois en Europe,
continue de saisir les transformations du paysage américain.

Beverly Boulevard and La Brea Avenue, Los Angeles, California, June 21 , 1975 de la série Uncommon Places,1973-1986 © Stephen Shore. Courtesy 303 Gallery, New York and Sprüth Magers

VÉHICULAIRE ET VERNACULAIRE

C’est par le biais de cette forme véhiculaire que Stephen Shore transcende ainsi la notion de vernaculaire, « cette culture de l’utilité, du local et du populaire tellement typique des États-Unis », comme le formule Clément Chéroux, commissaire et directeur de la Fondation Henri Cartier-Bresson. « Les différents moyens de locomotion utilisés par le photographe lui ont permis de multiplier les occasions de confrontation autant que les points de vue sur cette américanité », explique-t-il. En 1976, Stephen Shore a également participé à deux expositions majeures : « New Topographics », à la George Eastman House de Rochester, auprès de huit photographes qui ont redéfini l’approche américaine du paysage, et « Signs of Life » au musée Smithsonian à Washington DC, où il a photographié différents types d’architecture entre Los Angeles et New York. Ici, un fragment de cette dernière exposition est reconstitué pour l’occasion. Ainsi, comme de coutume chez Stephen Shore, le voyage, « aussi important que la destination », reste le parfait prétexte « pour expérimenter et construire une oeuvre photographique singulière ».

Bas : Amarillo, Texas, July 1972, de la série American Surfaces 1972-73 © Stephen Shore. Courtesy 303 Gallery, New York and Sprüth Magers


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