La monographie XXL de la maison Taschen retrace le travail de l’architecte espagnol Santiago Calatrava, qui allie architecture, ingénierie, sculpture et formes organiques dans des conceptions spectaculaires, harmonieuses et poétiques.
Santiago Calatrava Valls fait partie des « starchitectes », à l’image de Jean Nouvel, Frank Gehry ou Zaha Hadid. Ce natif de Valence, installé en Suisse, s’est fait un nom en créant des architectures aérodynamiques et organiques, où la poésie le dispute à la sculpture et au vivant. Il a conçu des ponts, des gares, des tours, des aéroports, des musées ou encore des stades. Des lieux de rencontres et d’échanges, donc, qui relient les gens dans un flux de mobilité permanent. La maison Taschen et l’auteur Philip Jodidio, derrière plusieurs ouvrages d’architectes majeurs tels que Shigeru Ban (Acumen n° 48), rendent ainsi hommage à ce maître hors norme dans une monographie XXL en édition limitée, aussi grandiose que ses folies architecturales.
DES SCULPTURES EN ARCHITECTURE
Architecte, ingénieur, peintre, sculpteur et même céramiste, l’homme de 73 ans est tout à la fois. Il s’est façonné un parcours académique riche et éclectique, combinant l’art, l’architecture et l’ingénierie dans un tout cohérent et expressif. Après des études en dessin et en peinture, puis en architecture et en urbanisme, Santiago Calatrava a très vite ajouté à son pedigree un doctorat en génie civil.
Page après page, ses conceptions, qu’il a su ériger au rang d’oeuvres d’art, démontrent ce goût du sculptural et du spectaculaire. Il faut dire que parmi ses influences importantes, il compte des architectes comme Le Corbusier et Robert Maillart, mais aussi et surtout des physiciens-théoriciens (Albert Einstein), des artistes, des sculpteurs et des peintres (Alexander Calder, Auguste Rodin, Joan Miró, Francisco de Goya, Antoni Gaudi, Léonard de Vinci).
À la vue de ses réalisations architecturales, on ne s’étonne guère alors du résultat final ; le virtuose catalan s’interroge sans cesse sur la dimension du temps, la masse, le mouvement, le statique et le biomorphisme. Toutes prennent ainsi l’apparence de sculptures aériennes, élancées, géométriques et ondulantes.
ENTRE ESTHÉTIQUE ET COMPLEXITÉ
Ses créations évoquent ainsi pour le regardeur tout un imaginaire tiré du corps humain ou de la nature. La gare TGV de Lyon-Saint-Exupéry et le World Trade Center Transportation Hub à Manhattan rappellent le mouvement des ailes d’un oiseau. La gare de l’Orient à Lisbonne semble avoir des quais couverts d’arbres. Le chai de Bodegas y Bebidas en Espagne prend la forme de vagues ondulantes grâce au mouvement donné à sa toiture en aluminium. La Cité des arts et des sciences de Valence s’inspire de la forme d’un oeil humain, une récurrence dans son travail. Sans oublier le pont Samuel Beckett à Dublin qui prend des allures de harpe, ou encore l’Opéra de Valence, conçu comme une série de volumes aléatoires, qui s’empare de formes surréalistes tout en évoquant par certains côtés une proue de bateau. Quant au Turning Torso en Suède, ce bâtiment est sans doute le plus représentatif de son intérêt pour le corps humain, la sculpture et l’art du statique et du mouvement.
Si le reste de son oeuvre est à l’avenant, du complexe sportif des Olympiades d’Athènes au musée de Demain à Rio de Janeiro, ce travail notable lui a quand même valu ces dernières années de nombreux reproches pour ses dépassements de budget et ses retards. Toujours est-il qu’au fil des pages de ce beau livre XXL, ses dessins à l’aquarelle combinés aux photographies mettent
en évidence une vraie puissance dynamique à l’échelle du bâti.
CALATRAVA. COMPLETE WORKS 1979–TODAY DE PHILIP JODIDIO
TASCHEN, SEPTEMBRE 2024
TASCHEN.COM