Les vingt-cinq ans de Requiem for a Dream

Le film culte de Darren Aronofsky célèbre déjà son quart de siècle, avec une ressortie en salles et en vidéo dans une splendide version remasterisée en 4K. Vingt-cinq ans après, que reste-t-il du choc Requiem for a Dream ?

C’était l’un des grands films de l’an 2000. On se souvient de cette mise en scène ultra-rythmée évoquant l’esthétique des clips. On se rappelle la confirmation de nouvelles stars, Jared Leto (29 ans) et Jennifer Connelly (30 ans), et la consécration de talents du siècle précédent (à 68 ans, Ellen Burstyn a obtenu pour ce film sa 5e nomination pour un Oscar, vingt-six ans après L’Exorciste). Requiem for a Dream, malgré son succès modeste au box-office, est devenu rapidement un film culte. À l’instar de Fight Club de David Fincher (1999), il fait partie de ces films combinant une esthétique novatrice avec un sujet social fort (la société de consommation pour Fight Club, la consommation de drogue pour Requiem for a Dream). Ces deux films ont su séduire une génération d’adolescents. Si la mise en scène de Requiem for a Dream, loin d’être intemporelle, est fortement ancrée dans son époque, elle n’a rien perdu de son efficacité vingt-cinq ans plus tard. Est-ce le revival du style « Y2K » ou un talent qui dépasse les effets de mode ? Difficile à dire. Quoi qu’il en soit, l’hypnotique montage de Requiem for a Dream reste toujours aussi séduisant. Et c’est cette séduction qui fait aussi la force glaçante du film, avec le destin tragique qui attend ses personnages, victimes de leurs addictions aux médicaments ou à l’héroïne.  

On présente souvent les effets de la consommation de drogue comme une spirale, qui entraîne l’addict dans son inévitable tourbillon. La mise en scène survoltée de Requiem for a Dream sert justement ce propos. Les personnages s’enfoncent inexorablement dans leur consommation vers un point de non-retour. Et bien que l’on sente le désastre approcher, la mise en scène virtuose de Darren Aronofsky nous force à ne pas détourner les yeux, comme si nous étions nous même pris dans cette spirale. On pourrait analyser longtemps les raisons qui rendent ce tourbillon aussi hypnotique. Il y a certainement les nombreux effets de montage, comme les accélérations de l’image. Il y a aussi ces fameux gros plans sur l’iris du personnage après sa consommation de drogue, devenus les plans signature du film. Et puis, il y a bien sûr la musique de Clint Mansell, avec les cordes du Kronos Quartet. Le thème phare de la bande originale, l’iconique « Lux Aeterna », est si diablement efficace qu’il a depuis été utilisé des dizaines de fois – parfois à outrance – dans nombre de bandes-annonces et de publicités. Écoutée en 2025, cette BO prend aussi des accents résolument modernes. Il faut dire que Clint Mansell est un proche de Trent Reznor, fondateur du groupe Nine Inch Nails et parmi les compositeurs les plus en vue du moment (The Social Network, Challengers, Queer…). Quant à Mansell, on a entendu sa musique récemment chez Ben Wheatley mais aussi dans le Love Lies Bleeding de Rose Glass. 

Mais au-delà de cette réalisation remarquable, le film – qui est par ailleurs objet d’étude dans des cours d’addictologie à travers le monde – présente une observation très précise des mécanismes de l’addiction : l’effet salvateur immédiat de la substance, l’euphorie qui succède à sa consommation, la sensation excitante ou planante suivant le produit ingurgité ; et puis, le besoin irrépressible d’en reprendre, le sentiment qu’il est impossible de vivre sans, la colère, l’angoisse, la paranoïa, les hallucinations et bientôt la folie que le manque entraîne. Ainsi, en quelques mois, une jeune femme pleine de projets pour son avenir est amenée à se prostituer pour avoir sa dose. Une dame âgée et un brin naïve à qui un médecin peu scrupuleux a prescrit des pilules de régime à base d’amphétamine se transforme en folle hirsute qui parle seule dans le métro. Si l’on habite dans une grande ville moderne, il arrive souvent hélas de croiser ces junkies parfois effrayants. Le deuxième film de Darren Aronofsky, aussi pop que glaçant, et qui a fait plus pour la lutte contre la drogue que bien des campagnes de prévention, rappelle que ce sinistre destin peut arriver vite et à n’importe qui.

Requiem for a Dream de Darren Aronofsky
Ressortie en salles et en Blu-ray 4K UHD le 9 avril

Voir plus d'articles

Des experiences et une culture qui nous définissent

Ne ratez aucun article

Inscrivez-vous à notre newsletter