Biennale Émergences

Les cinq coups de cœur de la rédaction d’Acumen

La Biennale Émergences fait son grand retour à Pantin, dans les murs du Centre national de la danse, pour célébrer la création contemporaine. Un rendez-vous incontournable pour tout amoureux du design. Avant que n’ouvrent les portes de l’événement, Acumen a repéré cinq talents à découvrir impérativement, du 10 au 13 avril. 

Jean-Baptiste Durand, de l’argile à la F1

« Classique » : c’est ainsi que Jean-Baptiste Durand évoque son début de parcours. Après un passage aux Beaux-Arts de Saint-Étienne, le designer en devenir entre chez Mathieu Lehanneur, à qui l’on doit la dernière torche olympique. Une expérience dans l’univers du luxe et un Rado Star Prize plus tard, Jean-Baptiste Durand est alors en pleine remise en question : « Je me suis rendu compte que la vie que je cherchais en tant que designer indépendant, médiatisé, était une sorte de miroir aux alouettes, et ne m’amenait pas sur le chemin de la vie que je voulais avoir. J’aspirais à une vie plus calme et plus heureuse. J’ai quitté Paris pour m’installer au Havre. Avec ma copine de l’époque, j’ai ouvert un atelier de céramique. On y faisait des choses sans prétention, mais malgré tout, je sentais que cette espèce d’étincelle créative était toujours là, latente. Après notre séparation, j’ai gardé ma partie de l’atelier, mais personne ne s’intéressait à mon travail. » Dans un ultime effort, le créateur participe en 2023 à la Paris Design Week où il présente une série de vases expérimentaux. « Pendant les 4 jours de la Design Week, j’ai fait le chiffre d’affaires que je faisais en 6 mois au Havre, donc je me suis dit que j’allais peut-être continuer. » Il enchaîne avec la foire Collectible à Bruxelles, où il présente une chaise, la Spring Chair. Il y convoque son amour d’enfance, la Formule 1, à renfort de couleurs vives, câbles et ressorts. Une esthétique unique convoquant l’imaginaire de la machine, qui sera visible à Pantin, avec notamment l’étrange colonne ou totem Voices in my head, où se mélangent faïence et composants électroniques.

Lucas Zito Studio, sculptures de plastique

Diplômé en 2019 par la vénérable école qu’est la Design Academy Eindhoven, Lucas Zito imagine « un projet centré sur le recyclage des mégots de cigarettes par le biais de l’impression 3D ». Mais celui-ci tombe à l’eau : « L’épidémie de Covid est arrivée à ce moment-là et c’était très compliqué d’avoir un projet qui était centré autour de choses que les gens mettaient dans leur bouche. » Tuée dans l’œuf, sa démarche créative se poursuit sur le chemin de l’impression 3D tout court. C’est ainsi que sont nés les luminaires modulables BUOY, faits à partir de granulés de plastique recyclé localement ou encore issu de filières françaises. Très sculpturales, ces lampes affichent une robe blanche transparente ou couleur café. Des silhouettes à composer à l’envi.

Lou Motin, souvenirs du GIEC  

Lou Motin aime à explorer la question de transmission future, d’archéologie, de fragments, « de ce qui subsiste de notre période contemporaine ». Après une première formation en décor de théâtre à l’ENSAAMA-Olivier de Serres, l’artiste bifurque vers l’univers de la fonderie d’art avant d’embrasser celui de la taille de pierre. Des pierres récupérées, « essentiellement des morceaux de mur », autour de son atelier, « une ancienne usine de pierre industrielle qui a été abandonnée dans les années 1950 ». Des éléments qui deviennent le support d’une œuvre bien singulière. « Cette série s’appelle Fragments du GIEC. C’est un travail que je mène depuis plus de deux ans maintenant, qui consiste en une retranscription du dernier rapport du GIEC, mais en code binaire [suite de 0 et de 1], un code d’ordinateur », précise l’artiste. À ce langage informatique s’ajoutent des schémas du fameux rapport, dont le sens se perd : « Tout devient complètement abstrait. » Réalisées à la main, à l’aide de poinçons et au ciseau, les pièces de Lou Motin, présentées lors de la Biennale, résument 2 des 180 pages de la version anglaise semi-abrégée. Son objectif ? En retranscrire la totalité.

Théo Charasse, designer fabricant

Parisien passé par l’ESAD de Reims, Théo Charasse se présente comme un touche-à-tout. Y compris designer, mais « pas forcément industriel », précise-t-il. Il hésite aussi avec le terme « fabricant » : « Je suis encore en train de découvrir ce qui me convient le mieux, en fait. Je teste pas mal de choses en ce moment, afin d’apprécier les limites de ce que l’on peut faire soi-même via les prototypes. » Parmi ses premiers tests, À portée de main, un projet de diplôme grâce auquel il est allé « observer des techniques amateurs, mais aussi des techniques de fabrication vernaculaires ». Il précise : « J’avais aussi établi une liste de matières que moi je qualifie de non homologuées, des choses qui ne sont pas valorisées dans le domaine du design, qui sont même blacklistées. » Parmi les matériaux en question, de l’aggloméré, « qui est tout le temps caché en dessous d’un plaquage ». Le jeune homme s’intéresse également aux bouteilles de verre, dont il fait des luminaires et étagères à découvrir à l’occasion de la Biennale de Pantin. « Je me suis intéressé aux bouteilles de verre, que je trouvais pas mal chez des bricoleurs. Cette matière est noble, mais pas forcément évidente à travailler. Donc, j’ai décidé d’essayer de détourner cet objet industriel en le découpant et en enlevant le goulot et le culot. Il ne reste qu’un cylindre, presque neutre, qui n’a presque aucune trace industrielle. » Un détournement qui donne lieu à des pièces tout en transparence et aux tonalités chaleureuses.

Alice Trescarte, céramiste brutaliste 

Directrice artistique, Alice Trescarte est aussi céramiste. « Initialement, c’était vraiment un plaisir personnel, puis la céramique est devenue une obsession », raconte-t-elle. Une obsession qui se traduit par la réalisation de boîtes et autres objets faussement usuels. Leur allure est crue, brutale, et profondément organique. Elle les décrit comme des sculptures. Une grammaire esthétique que la créatrice est allée retranscrire dans des assises, des tabourets. « Ils rappellent des tabourets en bois, de type trépied, très rustiques. Je me suis inspirée de cet objet-là parce que ma technique, qui est en fait une technique de découpage à partir d’un bloc d’argile, de terre, me rappelait vraiment cet objet-là. » Grâce à un savant mélange de minéraux, ses réalisations semblent extraites d’une masse de pierre. « La façon dont je travaille est plutôt une méthode de sculpture, parce que je pars d’un bloc, dont j’enlève les parties superflues, tout comme le processus d’un sculpteur de pierre. Je fais également énormément référence à des formes de rochers ou d’ensembles de pierres. J’utilise aussi beaucoup de pierres dans la fabrication de mes émaux, mais aussi des cendres que je récupère dans des cheminées, des poêles, et de la pierre de schiste de Lozère, dans le village où j’ai grandi, non loin d’une rivière. »

​​Biennale Émergences

Centre national de la danse

1, rue Victor-Hugo, Pantin

Du 10 au 13 avril 2025

emergences-biennale.fr 

Des experiences et une culture qui nous définissent

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