INTERVIEW FÉLIX KYSYL : UN ACTEUR QUI BRILLE AU CINÉMA

Félix Kysyl, fils de comédiens et formé au Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris, se distingue par son jeu intense et authentique, surtout dans des rôles complexes. Après des débuts au cinéma dans des courts métrages et petits rôles, il s’est fait remarquer avec Miséricorde d’Alain Guiraudie, sélectionné à Cannes 2024, et a été nommé aux César 2025 du meilleur espoir masculin. Cette année, il revient à Cannes avec Qui brille au combat de Joséphine Japy, où il joue Thomas, un homme toxique dans une famille fragile. Prochainement, il incarnera Jean Moulin dans De Gaulle d’Antonin Baudry. 

Le métier d’acteur est-il un choix évident quand on a des parents comédiens ?

Non. Jusqu’à mes 18 ans, donc très tard, je voulais ne surtout pas faire ça. On me demandait « Qu’est-ce que tu feras plus tard ? Tu vas faire comme tes parents ? », et non, je ne voulais pas. Puis, je crois que ça m’a rattrapé quand j’ai joué dans le court métrage d’école d’un pote. J’y ai pris tellement de plaisir que je me suis dit que c’est ça qui m’amusait. J’étais un peu tombé dans la marmite en étant petit, donc il y avait aussi quelque chose d’assez familier dans cette vie-là. Je n’ai pas fait de rupture avec ma famille, bien au contraire, et c’est hyper joyeux. Je peux en parler avec mes parents qui me comprennent et me soutiennent vachement. Ils sont hyper derrière moi.

Beaucoup de parents comédiens tentent justement d’éviter que leurs enfants fassent le même choix de carrière pour les protéger. Les vôtres ont-ils essayé ?

Pas du tout ! Ils m’ont soutenu assez rapidement. Je crois qu’aucun des deux n’a été étonné par mon choix. Ils ont trouvé ça assez logique et ils étaient derrière moi dès le début. Ils sont venus me voir jouer au théâtre assez tôt. Petit à petit, ils étaient de plus en plus rassurés du fait que c’était le bon endroit pour moi. Puis, ils m’ont surtout laissé très libre. Ils me donnent des conseils. On peut travailler et parler ensemble de plein de choses. Ils ont vachement confiance en moi. 

Et vous, avez-vous cette même confiance en vous ?

Ça dépend des moments, en fait. Je pense qu’on a toujours des moments de « Est-ce que je suis légitime ? ». Après, on travaille à cette chose-là, et quand on est fier de son travail, là, on a confiance en soi. Oui, quand je suis fier de mon travail, j’ai confiance en moi. 

Votre nomination au César 2025 de la meilleure révélation masculine a-t-elle appuyé cette légitimité ?

Oui. Il y a aussi beaucoup de gens qui me font confiance, donc c’est aussi très joyeux pour moi, très agréable. La confiance est là, et surtout, le plaisir. La confiance est un peu liée au plaisir, finalement.

Cela fait quoi d’être révélé au grand public par un premier rôle au cinéma quand on fait ce métier depuis bien plus longtemps ?

Ça fait toujours plaisir parce que c’est un immense coup de projecteur. C’est vrai qu’avant, je faisais beaucoup de théâtre, et je faisais partie de l’immense majorité d’acteurs qui travaillent bien, mais qui n’ont pas forcément le coup de projecteur. Sur le nombre de comédiens qui travaillent beaucoup, finalement, il y en a très peu qui sont très connus. Ça me fait plaisir d’avoir ce coup de projecteur, car ça amène aussi des projets que j’aime. Ça ramène un peu de sérénité par rapport aux choix qu’on fait.

Considérez-vous le film Miséricorde comme le tournant de votre carrière ?

Miséricorde, c’est le game changer, oui (rires). C’est ce qui a fait tout basculer. Il y a eu le succès du film, et il y a eu aussi la pâte Guiraudie, qui fait souvent naître des acteurs. Et il y a quand même cette aura en plus de la nomination aux César, et tout ça donne vraiment des coups de projecteur. 

Aviez-vous le sentiment de participer à un projet qui allait autant compter au moment du tournage de Miséricorde ?

On pouvait y penser, oui. Alain Guiraudie, c’est quelqu’un que je connaissais d’avant. Je connaissais aussi ses films. Il a quand même toujours un beau succès d’estime, c’est quelqu’un de très respecté. Je sentais qu’il avait confiance en son film et qu’il savait ce qu’il faisait – ce qui était hyper agréable. On ne sait jamais si un film va être un succès, s’il va être à la hauteur de ce qu’on voulait faire à la base. Sur ce film, moi, je me suis absolument concentré sur le plaisir que j’avais. C’est assez rare, mais chaque jour de tournage, je savais que j’étais heureux d’instant en instant. 

Ce tournage a-t-il été laborieux du fait de l’atmosphère du récit ou du nombre de prises ? 

Alain Guiraudie ne fait pas beaucoup de prises, et finalement, c’était assez simple à tourner. Miséricorde peut avoir une ambiance très bizarre qui peut être un peu dérangeante, mais on a fait ce film de manière très saine en faisant énormément de blagues. Alain, c’est quelqu’un qui fait des blagues sur le plateau, donc ça détend, et tout le monde est trop content de travailler. Il est simple, donc il travaille aussi simplement. 

Vous revenez à Cannes cette année avec Qui brille au combat de Joséphine Japy. Quand avez-vous découvert le film fini ?

Je l’ai découvert hier, à la projection officielle. C’est un film tellement sensible que je laisse un peu Joséphine Japy décider de ce qui est bon pour elle, comment elle a envie de le gérer. Moi, je la suis quand elle a envie que je sois là, quand elle a besoin de moi, et je suis très délicat avec ça. En termes de timing, ça s’est fait comme ça. Je n’avais jamais découvert un film dans lequel je joue à Cannes, alors j’étais content de le découvrir de cette manière-là. Je n’ai pas vraiment de règles et ça ne m’arrive pas non plus tous les quatre matins (rires). 

Qu’est-ce qui vous a séduit à la lecture du scénario de ce film ?

C’est la sensibilité. Je l’ai trouvé tout de suite très beau, très sensible, très élégant aussi pour parler de la maladie et de comment une famille la gère. C’est une histoire de famille avant tout et je trouve ça toujours très beau, les films de famille qui parlent de difficultés dans la famille, mais qui montrent que la famille est aussi assez forte et soudée pour que ses membres arrivent à être ensemble.

Dans ce film, vous incarnez Thomas, un garçon toxique. Comment avez-vous abordé ce personnage néfaste ?

Mon personnage était très bien écrit. C’est important de montrer ces mecs toxiques, ils sont partout et il faut bien que quelqu’un les joue. il y a eu des moments où je le détestais, jouer la violence, c’était dur, parfois éprouvant, mais nécessaire. On connaît tous un Thomas. Avec Joséphine, on le voulait juste, pas une caricature. 

Qu’est-ce qui change pour vous dans le fait d’être dirigé par une actrice derrière la caméra ?

C’était super. Joséphine est très délicate, et ça se ressent sur le plateau. Elle vient du jeu, donc elle sait vraiment parler aux acteurs. J’avais déjà aussi été mis en scène par des acteurs au théâtre, et c’est vrai qu’on voit la différence. Elle insiste sur l’incarnation, le jeu, et ça fait une vraie différence. On se sent compris, on parle le même langage. C’est très agréable.

Ce film vous amène à Cannes pour la deuxième année consécutive. Que représente pour vous le Festival de Cannes ?

Ce festival a toujours représenté les paillettes, le cinéma et l’âge d’or hollywoodien. Le fait d’y participer est très émouvant. Il y a une ambiance hyper particulière, c’est comme être dans un autre monde quand on est ici. J’aime beaucoup être là.

Peut-être reviendrez-vous l’année prochaine avec le très attendu diptyque De Gaulle, réalisé par Antonin Baudry. Quel est votre personnage dans cette grosse production ?

Oui, je joue un personnage moins toxique cette fois (rires). Jean Moulin, c’est un héros clair dans sa loyauté, qu’on admire facilement. Je me suis vraiment plongé dans sa vie, j’ai beaucoup lu, je suis allé à Lyon visiter les lieux où il a vécu. C’est un rôle fort, qui va me suivre longtemps. J’ai hâte que ça sorte.

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