Quand l’avant-garde milanaise rencontre l’expertise technique californienne, cela donne naissance à une sneaker hybride, sculpturale, presque manifeste. Avec la Bondi B3LS, Marni et HOKA signent une collaboration inattendue, aussi fonctionnelle que furieusement désirable.

À première vue, Marni et HOKA n’avaient rien pour se rencontrer. L’un, enfant terrible de la mode italienne, cultive le chaos élégant, les motifs dissonants et les formes inclassables. L’autre, marque adulée des ultratraileurs et des férus de confort podologique, excelle dans la science de l’amorti et du maintien. Pourtant, c’est précisément dans cette opposition que naît une beauté nouvelle : celle d’une sneaker qui assume son excentricité tout en garantissant une expérience de marche sans compromis.
La Bondi B3LS, sortie le 3 avril sur le site de Marni (et dès le 4 chez HOKA et quelques revendeurs triés sur le volet), incarne cette fusion de l’improbable. Marni injecte son ADN maximaliste dans une silhouette conçue pour les longues distances. Résultat : une chaussure qui attire tous les regards, mais qui reste fondamentalement faite pour avancer.


La Bondi B3LS n’est pas une nouvelle venue. Présentée en 2023 comme la réinterprétation plus urbaine de la célèbre Bondi de HOKA, elle a rapidement conquis une clientèle mixte – des runners aux créatifs nomades. Mais dans les mains de Marni, cette sneaker franchit un cap esthétique.
Le design intègre une tige en polyester rehaussée d’un traitement caoutchouté partiel, donnant au modèle une brillance mate très contemporaine. Le padding discret offre un confort enveloppant, sans alourdir la silhouette déjà robuste. Fidèle à la philosophie de HOKA, la semelle oversize reste intacte, mais se pare ici d’une finition monochrome très affirmée.
Les logos des deux marques cohabitent discrètement mais avec une autorité certaine : HOKA sur la languette, Marni sur l’empiècement arrière. À cela s’ajoute un trio de jeux de lacets – plats, ronds ton sur ton ou rubans multicolores – pour une personnalisation raffinée.


On reconnaît Marni à sa manière de raconter des histoires en couleurs. Pour cette collection capsule, la maison italienne ne déroge pas à la règle et propose quatre teintes monochromes intenses : Poinciana, un rouge incandescent aux accents arty ; Bracken, un brun profond, presque minéral ; Tourmaline, un bleu dense au charme technologique ; Straw, un jaune paille doux et lumineux.
Chaque nuance est pensée comme un statement, une extension de la personnalité de celui ou celle qui la porte. Les tons mats, sans clinquant, accentuent la dimension sculpturale de la chaussure et permettent une infinité d’associations, du pantalon utilitaire au trench couture.
Ce qui frappe, au-delà de l’objet, c’est l’audace de cette collaboration. À une époque où les alliances entre marques de sport et maisons de luxe deviennent monnaie courante, Marni et HOKA évitent le piège du simple logo plaqué. Ici, il s’agit d’un véritable dialogue, d’une osmose créative.


HOKA apporte son savoir-faire biomécanique et son amour des défis topographiques ; Marni, sa capacité à détourner les codes, à réenchanter l’ordinaire par le détail et le contraste. Le fruit de cette rencontre dépasse la mode : il s’inscrit dans un geste artistique, où la sneaker devient un manifeste, un outil de déplacement mais aussi d’expression de soi.
Cette collaboration s’inscrit dans une dynamique plus large chez Marni. Depuis quelques saisons, la maison dirigée par Francesco Risso explore les territoires mouvants entre la mode, la musique, la scénographie et maintenant la performance. Après des shows immersifs et des collections pensées comme des partitions émotionnelles, cette incursion dans l’univers du footwear technique prolonge une volonté manifeste de sortir des sentiers battus.
Du côté de HOKA, ce projet marque une entrée assumée dans le champ du fashion-forward, sans renier ses racines. Pour la marque américaine, dont les semelles oversize ont longtemps été moquées avant d’être adulées, il s’agit d’une forme de consécration : celle d’avoir su séduire au-delà du terrain, jusqu’au bitume des capitales de la mode.

