Pour le centenaire de la naissance de Robert Frank en novembre, le MoMA présente une première grande rétrospective de ce photographe et cinéaste iconique, avec plus de 200 objets tels que photographies, films, livres et documents d’archives.
« Je fais toujours le même type d’images. Je regarde l’extérieur pour essayer de regarder l’intérieur, pour essayer de trouver quelque chose de vrai, mais peut-être rien n’est-il jamais vrai. » En soixante ans de carrière, Robert Frank (1924-2019) a su redéfinir l’iconographie et l’esthétique de l’image fixe et en mouvement. Plus encore, il a transcendé le reportage sur pellicule et amorcé un changement radical au mitan du XXe siècle.
Son livre révolutionnaire Les Américains (The Americans, 1958), présentant 83 photographies sur les plus de 20 000 capturées lors de son périple à travers les États-Unis, reste une oeuvre monumentale, brute et expressive, ainsi qu’une source d’inspiration pour bon nombre de photographes et de réalisateurs. Vagabond mélancolique et poétique, celui qui a été influencé par Walker Evans a lui-même animé les carrières de Jonas Mekas, John Cassavetes, Jim Jarmusch…
Aujourd’hui, le Museum of Modern Art (MoMA) offre de nouvelles perspectives sur son art interdisciplinaire. La rétrospective « Life Dances On: Robert Frank in Dialogue » remet en lumière les six décennies qui ont suivi la publication de son ouvrage phare, jusqu’à sa mort.
OBSERVATIONS SOCIALES EXISTENTIELLES
Plus de 200 objets (photographies, films, journaux visuels, livres, documents d’archives), agrémentés de citations et d’extraits d’interviews sur son processus créatif, sont ainsi exposés dans plusieurs espaces de l’institution new-yorkaise.
Tous ces artefacts viennent souligner de nouveau l’importance de son entourage proche, des personnes, connues et inconnues, et de la communauté Beat, qui ont contribué à façonner sa vision singulière et ses expérimentations perpétuelles. Si ses images ont défié les normes et bouleversé les conventions, elles ont surtout dépeint en un tout créatif et sans fard la société américaine, la culture de consommation, l’architecture, les rues et les paysages américains modernes.
L’exposition tire son nom de son film le plus personnel, Life Dances On (1980), centré sur ceux qui ont partagé sa vie, notamment sa fille Andrea et son ami et collaborateur Danny Seymour, tous deux décédés, avec en toile de fond les gens dans les rues à New York. Dans ces moments intuitifs, Robert Frank aborde le sentiment de perte. En 1994, il perdra également son fils Pablo.
EXPLORATIONS MULTIFORMES
L’exposition met ainsi en dialogue l’artistique et le personnel, l’autobiographique et l’expérimental de cette figure éminente. On y retrouve son premier court métrage, Pull My Daisy (1959), devenu une pierre angulaire du cinéma d’avant-garde, adapté de la pièce Beat Generation de Jack Kerouac. Mais aussi son premier long métrage, Me and My Brother (1969), qui a brouillé les frontières entre cinéma documentaire et scènes narratives, avec entre autres en vedette Christopher Walken et Sam Shepard dans son premier rôle. Ou encore True Story (2004) où il narre en voix off des scènes tournées dans ses maisons à New York et en Nouvelle-Écosse (Canada), explorant les thèmes de la mémoire et de la perte.
Le MoMA présente aussi parallèlement Robert Frank’s Scrapbook Footage, une installation multiécrans, dans les galeries Morita et Titus. Elle rassemble des séquences vidéo et des films inédits, compilés par Laura Israel, la monteuse de longue date du photographe-cinéaste, en collaboration avec le directeur artistique Alex Bingham. Ce matériel inédit, numérisé et restauré, découvert après sa mort, émane des archives de la June Leaf and Robert Frank Foundation.
Cette rétrospective sonde ainsi la quête d’un homme qui n’a eu de cesse de vouloir libérer les multiples possibilités de l’image photographique et filmique, explorant sa famille et ses rencontres, la perte et la mémoire, les traumatismes et les expériences de vie.
LIFE DANCES ON : ROBERT FRANK IN DIALOGUE
DU 15 SEPTEMBRE 2024 AU 11 JANVIER 2025 ROBERT FRANK’S SCRAPBOOK FOOTAGE
DU 15 SEPTEMBRE 2024 À MARS 2025
THE MUSEUM OF MODERN ART (MOMA) 11 WEST 53RD STREET, NEW YORK (ÉTATS-UNIS)
MOMA.ORG